Annonces et sermon du dimanche 19 avril
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Chers amis,
Même si les apparences peuvent être trompeuses, nous entrons dans la deuxième semaine des vacances !
Tout d’abord, je tiens à vous dire que ce Triduum fut très beau pour les abbés en bien des aspects. Dépouillé mais sanctifié. Sanctifiant pour beaucoup d’entre nous.
Ensuite, je remercie la générosité de nombre d’entre vous. Je me permets mettre un lien une dernière fois avec l’appel aux dons formulé durant la Semaine Sainte.
Dans la communauté, tout le monde se porte bien physiquement mais il faut continuer à nous soutenir les uns les autres car la vie de l’âme saine et sainte est encore plus importante. Le moral aussi !
Je vous donne tous rendez-vous à 18h30 pour vous unir à la bénédiction de la ville par Mgr Jordy, par l’intercession de Saint Martin.
La messe de dimanche sera célébrée par l’abbé Perret. Il n’y aura donc pas d’orgue. Le sermon sera mis en ligne dimanche midi.
Avec l’assurance de mes prières,
Abbé Le Roux
Sermon de l’abbé Perret :
Chers amis,
Cela l’a été dit de nombreuses fois : ce dimanche de Quasimodo (premier mot de l’introït) est celui de la vertu qui porte le même nom, la Foi.
Mais il est aussi appelé le dimanche de la Miséricorde.
Et il est intéressant de noter que ces deux vertus ont un rôle important dans les événements de l’Evangile d’aujourd’hui : l’Apôtre Saint Thomas qui se révèle être le moins enclin à croire en Notre-Seigneur-Jésus-Christ est finalement celui qui, par l’acte de miséricorde de ce même Seigneur Jésus, va devenir l’homme qui, dans tout l’Évangile, fera la plus belle profession de foi !
Regardons, si vous le voulez bien, comment se déroulent les choses. Alors que Jésus est déjà apparu à quelques personnes (Saint Jean, Saint Pierre, Sainte Marie-Madeleine) il apparait à l’ensemble des Apôtres, moins deux : Thomas n’est pas là, et Juda n’est plus – et non encore remplacé. Les dix Apôtres ont constaté ainsi par cette apparition la vérité de la Résurrection. De plus Jésus, en leur soufflant dessus, leur a transmis une première fois l’Esprit Saint pour leur donner le pouvoir de la confession, ce qui suppose un éclairage de l’intelligence et une certitude déjà bien ancrée de la foi en la Résurrection.
Or étant absent et ne recevant pas toutes ces aides providentielles, Thomas, fidèle à lui-même, aura du coup un temps de retard sur ses semblables lors de l’apparition d’aujourd’hui. Et ce temps de retard va lui donner droit à la première leçon d’apologétique de l’histoire du Salut ! Cette leçon va nous enseigner notamment deux choses (parmi bien d’autres) sur lesquelles je souhaiterais m’arrêter aujourd’hui.
- La recherche des motifs de crédibilité de la Foi est un puissant ferment pour cette même vertu.
- Se poser des questions sur la foi est plutôt un motif de fierté que de honte, si ce questionnement est de bonne foi.
Puissant ferment pour la vertu de foi
Les preuves de la résurrection que Saint Thomas demande, c’est Jésus lui-même qui va les lui donner, lui prouvant ainsi que croire ses semblables n’est pas vain ! De plus, avec les preuves que Jésus lui donne en lui faisant toucher ses propres plaies, force nous est de constater que St Thomas bénéficie d’une grâce particulière qui éclaire son intelligence, car nous l’entendons faire alors un pas de plus dans l’affirmation de la Foi en disant, non pas « Tu es le Messie » (comme saint Pierre l’avait dit quelques temps plus tôt) ou « Vraiment cet homme était le Fils de Dieu » (comme le centurion au calvaire), mais en professant la totalité de la Vérité : « Mon Seigneur et Mon Dieu ! »
L’acte de foi de l’Apôtre ne s’arrête donc pas au constat de la résurrection : il va jusqu’au bout ; jusqu’à l’affirmation de la divinité de Jésus, dont la résurrection est la preuve la plus éclatante. Il va pour la première fois jusqu’à dire que Dieu Trinité est pleinement présent en Jésus, confirmant ainsi ce qu’avait dit Jésus : « Qui me voit voit le Père. ». De plus, quant à ce qui regarde notre propre vertu de Foi, le fait que Jésus avait transmit l’Esprit Saint à ses Apôtres en leur soufflant dessus nous dévoile que là où est Jésus, l’Esprit Saint y est aussi.
Il est bon de se questionner sur sa foi
Mais au-delà de l’affirmation de la divinité de Jésus, au-delà de la réalité de sa consubstantialité au Père (que nous chantons dans le Credo), bref, au-delà de la profondeur infinie de cette Voie, cette Vérité et cette Vie une fois de plus professée en ce dimanche, cet épisode de l’Évangile centré sur le doute de Saint Thomas doit nous apprendre quelque chose d’autre. Et ce quelque chose est fait pour nous rassurer !
Si douter de Dieu, de la révélation, des fondements de notre foi peut parfois déstabiliser, nous rendre un moment faibles face aux attaques sournoises du maître du mensonge et de ses sbires de plus en plus nombreux, ce questionnement, – au-delà du fait, comme nous l’avons vu, qu’il va finalement nous fortifier – peut en fait, s’il est sincère et de bonne foi, constituer la preuve d’une de nos plus grandes dignités !
Le doute est certes, en lui-même une faiblesse, mais paradoxalement, il peut être une cause de force. Il ne faut donc pas le traiter en ennemi.
Un philosophe contemporain, Fabrice Hadjadj, dans l’un de ses livres « Résurrection, mode d’emploi », en méditant sur cette scène, l’explique ainsi : « Soyez cartésiens, allez plus loin encore et posez la question suivante : Qu’est-ce qui rend un tel doute possible ? Pourquoi n’avons-nous pas la placidité sans question des ruminants ? [ce à quoi notre époque tend à ramener le plus possible nos contemporains… NDLR] (…) Et bien confessons-le : si nous doutons (et ne doutons pas de notre doute), c’est parce que notre cœur malgré nous et malgré tout réclame la Vérité : nous n’aurions pas en nous cette soif de la Vérité que la piquette de nos petites opinions suffirait à nous satisfaire. Et si la croix nous paraît absurde au point de nous pousser à renier la joie, c’est parce que nous espérons une joie plus large encore, capable d’assumer et de transfigurer toutes les plaies de l’histoire. »
L’homme est envahi de questions parce qu’il a une intelligence à nourrir avec la Vérité (avec un grand V). L’homme est en attente de tendresse car il est fait pour être remplis par l’Amour (avec un grand A). Et ce dont se rend compte Saint Thomas lorsqu’il dit « Mon Seigneur et mon Dieu », c’est que cette Vérité et cet Amour sont là, devant lui ! Il n’a plus à chercher ailleurs (ce qu’il savait déjà en théorie, mais entre la théorie et la pratique, il y a toujours quelques ajustements à faire, quelques petites choses à préciser.)
Il faut aujourd’hui se battre pour croire en Dieu. Il faut se former pour ne pas être abusé par le relativisme ambiant. Saint Thomas nous est, à ce titre, fraternellement proche car il nous montre que ce combat n’est pas à notre honte. Pourquoi faudrait-il à tout prix voir un lien d’avertissement entre les deux phrases de Jésus :« Parce que tu as vu, tu as cru. » et « Heureux ceux qui croient sans avoir vu » comme si le Seigneur reprochait à Saint Thomas d’avoir demandé ces preuves ? Ne pourrait-on pas entendre plutôt Jésus dire : « ceux qui croient sans avoir vu sont aussi heureux, car ils ne sont pas plus trompés ; ils n’ont pas de raison d’être malheureux, car la vérité à laquelle ils croient est la même que celle de ceux qui ont vu. »
Et comme pour nous conforter dans cette interprétation, Fabrice Hadjadj constate : « Et l’on s’aperçoit que ce mauvais Apôtre ressemble au bon larron [qui fut d’ailleurs le premier saint ! NDLR]. Il a raté l’Esprit Saint, sombré dans le désespoir (…) et pourtant le voici d’un coup plus assuré que les autres, au point que selon la tradition, de tous les premiers envoyés, il est celui qui ira le plus loin – en Perse, peut-être en Chine, en tout cas jusqu’en Inde du Sud où il fonde sept églises… »
Ainsi, chers amis, Foi et Miséricorde font bon ménage aujourd’hui, grâce à Saint Thomas !
La Foi, cette vertu qui sauve, atteindra des sommets chez Saint Thomas car à cause de son doute, il a appelé la Miséricorde de Notre Seigneur. Et la bonté de Dieu, voulant que tous ses enfants soient parfaitement heureux et possèdent la vraie joie, accède toujours aux instances que provoque notre doute, si celui-ci n’est pas duplice, mais de bonne foi.
Comme cet homme de l’Évangile qui, avant Saint Thomas, avait insisté auprès de Jésus en l’implorant : « Seigneur, je crois, mais augmentez ma foi. » demandons ces deux grâces si vitales en ce dimanche de Quasimodo afin de pouvoir dire un jour au bon Dieu, comme saint Paul : « J’ai combattu le bon combat, j’ai achevé la course, j’ai gardé la foi. »
Ainsi soit-il